Posted on 16 January 2014
Elena Sergi, étudiante en doctorat à l'Université de Pavie, sous la supervision d’Ariane Landuyt, professeur Jean Monnet à l'Université de Sienne, a récemment effectué une recherche sur les revues de l'Association européenne des enseignants (le fonds de l’AEDE) aux Archives historiques de l'Union européenne (AHUE) à Florence. Pour sa thèse de doctorat Elena Sergi a reçu une bourse de recherche Sorensen du président de l'Institut universitaire européen, le professeur Joseph Weiler, qui finance une recherche d'un mois aux AHUE.
Lors du processus d'intégration européenne, la plupart des mouvements, des groupes politiques et des associations pro-européennes ont publié des revues pour diffuser des informations et pour sensibiliser à une nouvelle réalité politique émergente d'une Europe unie. Par ailleurs, ces groupes ont utilisé ses revues pour fournir une critique, certes déformée de l'interprétation du processus, insufflant les valeurs spécifiques, les stratégies et les objectifs de chaque mouvement.
La recherche d’Elena Sergi traite des revues de l'Association européenne des enseignants dont l'objectif principal était de créer une conscience européenne parmi le corps enseignant, les élèves et les étudiants. Elle se concentre en particulier sur les revues des branches les plus actives, la française Education européenne et l’italienne Scuola d'Europa, sur une large période de la fondation de l'AEDE en 1956 au début des années 70. Les programmes scolaires dans ces pays ont permis de transmettre l'information et de l’adapter à travers l'enseignement pour les jeunes de tous les âges. L'intention des revues était également de lancer des débats entre les lecteurs et d’interagir en fournissant un espace de publication pour les enseignants.
« Une association sans organe d’information est un corps sans âme: l’information est une des tâches les plus importantes. On a dit parfois qu’une bonne partie des enseignants est indifférente (…) aux idées d’intégration européenne. Je ne le pense pas ; encore convient-il de leur donner les informations indispensables, et de leur montrer combien leur coopération est nécessaire pour obtenir une pénétration rapide de ces idées dans les milieux qu’ils peuvent toucher (…) où l’influence de l’instituteur est parfois prépondérante » (André Alers, A nos collègues français, in « Education européenne », n. 1, octobre 1957)
En particulier, la branche italienne estimait que les enseignants devaient soutenir l'idée fédérale européenne comme seule alternative possible à l'extrémisme nationaliste. Une Europe fédérale aurait donc été prise en charge par les éducateurs dans les systèmes éducatifs nationaux. Les plus anciens numéros ont invités les enseignants à se concentrer sur toutes les disciplines avec comme dénominateur commun la culture européenne, à savoir l'histoire, la géographie et la littérature, mais aussi à promouvoir une nouvelle discipline comme l'éducation civique européenne dans les écoles primaires et secondaires et la création d'une Communauté européenne des écoles, y compris des universités.
Le contenu des revues a été modifié sensiblement entre 1968 et 1969 marquant une rupture avec le passé, du point de vue culturel, pédagogique et institutionnel. Les contestations de 1968 ont remis en question la pertinence des modèles éducatifs existants et du modèle archaïque de la démocratie. En 1969, Charles de Gaulle a quitté la scène politique et le Sommet de la Haye a relancé le processus d'intégration suivant les trois lignes de la perfection, du renforcement et de l'élargissement de la Communauté.
Le mot-clé dans les bulletins de ces années a été la «participation» et après 1969 l'engagement et l'enthousiasme pour la création d'une Europe fédérale et d'un nouveau modèle d'enseignement a diminué. Dans les deux bulletins, le débat change passant d’un niveau pédagogique et culturel à un niveau économique et institutionnel avec des sujets économiques plus fréquents (la dévaluation du dollar et la crise économique mondiale) ou se référant à l'élargissement de 1973 (Royaume-Uni, l'Irlande et le Danemark). La perte de l'accent sur l'éducation a créé un déséquilibre entre l'approfondissement économique des Communautés et un affaiblissement de l'intégration politique et culturelle. En outre, l'introduction d'élections directes au Parlement européen en 1979 n'a pas été suffisamment exploitée par les éditeurs des revues pour favoriser la formation d'une citoyenneté européenne par des moyens éducatifs.
La recherche d’Elena Sergi a été présentée à la conférence internationale «Communiquer l'Europe. Journaux et intégration européenne 1939-1979 » à l'Université de Pérouse-Assise en mai 2013 et a été récemment publiée avec les actes de la conférence.
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